6/6/24
15:00 - 16:30 HNE

Séances parallèles IV - Communications

Local : Studio 1 – LANTISS (CSL-3655)

Modération : Carole Nadeau (U. Laval)

Roxanne Martin (Collège André-Grasset)
L’écoconception : le recyclage comme moteur de création en scénographie

David Bellavance Ricard (U. Laval)
Recycler les technologies, entrer en relation et créer avec elles, une position écosophique

Lara Kanso (U.Laval)
L’anatomie d’une rencontre entre un lieu et une corporéité

 

Détails et descriptif de l'événement

Roxanne Martin 

L’écoconception : le recyclage comme moteur de création en scénographie

Une fois les représentations théâtrales terminées, le vêtement de scène est la plupart du temps modifié et réutilisé pour la production suivante. Ce recyclage des costumes a longtemps été motivé par des considérations financières, mais plus récemment, il est aussi le fruit d’une préoccupation environnementale, puisque l’industrie textile est le deuxième secteur le plus polluant au monde. La réutilisation des vêtements de scène est une chose courante au Québec depuis les années 1970. Plusieurs ateliers et organismes, comme le Centre national du Costume et plus récemment Le Grand Costumier travaillent dans une approche circulaire à promouvoir les métiers du costume et créer des ponts entre les artisans et la relève.

Le recyclage à grande échelle des éléments de décor est par contre plus récent. Depuis quelques années, certains organismes se dédient à accompagner les compagnies dans leur transition écologique. Écoscéno, par exemple, un organisme fondé en 2019, sensibilise les concepteurs de décors et les compagnies de théâtre à la valeur de la réutilisation. Ces organismes contribuent ainsi à réduire l’empreinte écologique de l’industrie de la scénographie, à réduire les déchets qui se retrouveraient autrement à la décharge et ainsi promouvoir autrement la création scénique. Selon l’axe « Porter attention », j’aimerais m’attarder à la notion d’écoconception qui appelle à la reconfiguration des pratiques en scénographie dans une visée écoresponsable et qui contribue à l’émergence de nouveaux modes de création chez les concepteurs de costumes et de décors. Les changements climatiques mèneront les créateurs vers une conception, une confection, un réemploi et un recyclage de ces objets dans une économie circulaire, que l’Union des scénographes (France) qualifie de cycle d’éco-scénographie. Je me baserai d’abord sur les écrits de Sylvie Perault dans son approche ethnologique du costume de scène et je propose de faire un état des lieux des problématiques soulevées par Ralph Elawani (Jeu, 2020), il y a presque 4 ans, et comment elles s’inscrivent dans la réalité théâtrale actuelle.

Bio : Roxanne Martin est professeure de théâtre et de littératu re au Collège André-Grasset (Montréal). Elle s’intéresse au costume et à la scénographie québécoise depuis plusieurs années. Elle s’est attardée d’abord au travail du peintre Alfred Pellan comme scénographe et concepteur de costumes. À ce sujet, elle a contribué à deux ouvrages, Alfred Pellan. Le rêveur éveillé (MNBAQ, 2013) et Pellan & Shakespeare : le théâtre des rois (MMAQ, 2017), tirés de deux expositions sur le travail du peintre. Elle a signé les éléments consacrés à la scénographie dans l’ouvrage Le théâtre contemporain au Québec 1945-2015 (PUM, 2020), sous la direction de Gilbert David. Puis, dans le cadre de son doctorat, elle s’est intéressée à l’approche du vêtement de scène de François Barbeau et de sa vision du métier de concepteur de costumes (Université Laval, 2018). Une monographie tirée de sa thèse de doctorat sera publiée bientôt (PUM, 2024).

David B. Ricard

Solo pour trois projos (ou plus) : recycler les technologies, entrer en relation et créer avec elles, une position écosophique. 

Durant l’été 2020, j’ai été témoin du vidage d’un appartement. Les videurs ont  jeté l’entièreté du matériel de la locataire défunte par-dessus la rambarde du deuxième  étage. En voyant les téléviseurs cathodiques se fracasser au sol, un sentiment  d’impuissance m’a amené à prendre la décision d’utiliser un maximum de matériel  considéré comme désuet pour mes projets de création. 

La pensée écosphique dans la veine des Nouveaux Matérialismes et de l’Object  Oriented Ontology, se veut l’occasion de replacer l’humain au sein d’un environnement  dé-hiérarchisé et de questionner le rapport à son habitat. C’est à partir de cette  philosophie que j’ai développé la performance Solo pour trois projos. 

Comment ne pas instrumentaliser un instrument ? Mon hypothèse repose sur  des processus tels que l’écoute augmentée, l’individuation collective et l’improvisation, lieux de convergence d’affects en devenir s’opposant à  l’aboutissement de formes.  

Les technologies désuètes deviennent partenaires, cocréatrices et matières  d’inspiration. Jammer avec elles, faire chanter leurs circuits électroniques est un acte  politique, un hymne au vivant (dans un sens large) ou au caractère toujours résonnant d’une matière destinée à l’enfouissement.  

Bio : David B. Ricard, artiste multidisciplinaire basé à Québec, travaille avec la vidéo, le théâtre, le cinéma et la performance. Ses intérêts de recherche se concentrent sur la création intuitive, introspective et relationnelle. Il développe des outils d’improvisation et d’interaction qui favorisent la création spontanée et les échanges interartistiques. Ses penchants écosophiques le poussent à privilégier le détournement, la réutilisation et la remise en valeur d’outils jugés obsolètes. Il développe des méthodes de création collectives et alternatives basées sur des procédés de dé-hiérarchisation des langages et rôles scéniques. Les réflexions philosophiques et émotionnelles, ainsi qu’une approche expérimentale de la narrativité le poussent à développer des œuvres éclatées basées sur une dramaturgie plurielle.

Lara Kanso 

L’anatomie d’une rencontre entre un lieu et une corporéité

Appréhender un lieu avec une « corporéité » consciente fait de la rencontre un moment de co-création de sensations. Dans Du sens au sens (1989), Erwin Strauss définit la sensation comme étant « un mode de communication vitale, immédiate, sauvage et irrationnelle, […] une empathie avec le milieu ». Or, quand, les deux corporéités, humaines et spatiales, ou si j’ose dire, les deux chairs, au sens que Merleau-Ponty lui donne, à savoir « l’entrelacs de multiples sensations », ont déjà en commun la mémoire d’une même guerre, leur re-rencontre où chacun est lui-même, mais aussi un « autre », est vivante. Comment s’est fait alors mon retour vers les quelques lieux qui avaient marqué mon enfance et façonné mon corps/ territoire? Et quels récits donnent à voir, à entendre, à sentir, à toucher ce face-à-face avec des lieux de claustration et des lieux d’ouverture sur un territoire de guerre? Dans cette expérience qui montre que l’absence de la nature et de “l’autre-qu’humain” dans le quotidien de l’humain a autant d’impact que leur présence. Je partagerai au cours de cette conférence- performance les résultats de mon premier laboratoire de recherche-création doctorale. Le mot partage est à considérer dans la définition qu’en donne Georges Didi-Huberman dans son livre Le témoin jusqu’au bout (2022) : « C’est la puissance du mot partage que de conjoindre […] une division constitutive (mettre à part) et une nécessaire mise en commun (prendre part). C’est alors que ce qui nous partage à l’intérieur nous é-meut vers l’autre, nous com-meut avec autrui”. Cet “autre” est à la fois le lieu et le territoire; mais aussi le spectateur.

Bio: Lara Kanso est metteuse en scène et doctorante en « Littérature, arts de la scène et de l’écran» à l’Université Laval, au Canada. Elle a mis en scène et co-écrit plusieurs créations théâtrales multidisciplinaires et interculturelles. Elle a collaboré à l’Encyclopédie Le Théâtre dans l’Histoire : les scènes, les hommes, les œuvres (2016). Son texte dramatique « Tu m’as souvent parlé de bonheur » a été publié en France en 2023. Elle travaille actuellement sur une création théâtrale dont elle signe la mise en scène et l’écriture avec le Petit Théâtre du Vieux Noranda. Sa recherche-création doctorale porte essentiellement sur le théâtre néo-documentaire, revisité à la lumière des théories du néo-matérialisme et d’écologie dans les arts vivants. 

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