Séances parallèles VI - Axe Recherche-création
Essais performatifsLocal : Studio T (CSL-0728)
Recherche et création d’un nouveau relationnel
Essais performatifs
Modération : Claudia Bernal (UQAC) et Thomas Langlois (U.Laval)
Thomas Langlois (U. Laval)
Corpoème
Claudia Bernal (UQAC)
Le corps-territoire comme lieu de résistance
Claudia Blouin (U. Laval)
Faire monde avec la laine
Sylvie Lapierre (U. Laval)
L’expérience immersive médiatrice de la résonance au sein du dialogue homme-nature
SQET
Corpoème
Le corps-territoire comme lieu de résistance
Faire monde avec la laine
L’expérience immersive médiatrice de la résonance au sein du dialogue homme-nature
Détails et descriptif de l'événement
Mesures d'accessibilité
Axe Recherche-création
Recherche et création d'un nouveau relationnel
Thomas Langlois
Corpoème
Si je me considère désormais comme un artiste multidisciplinaire et, de plus en plus, comme un créateur indiscipliné (dans tous les sens du terme), il demeure qu’une part importante de ma pratique artistique s’attarde à développer la mise en corps de la poésie, c’est-à-dire l’expression de la « dramaturgie » inhérente à celle-ci à travers, notamment, la plastique et l’expressivité du corps théâtral et performatif. Cette démarche, qui fut grandement nuancée et complexifiée depuis, tire ses origines de mes recherches à la maîtrise, où j’ai créé et expérimenté mon propre genre théâtral et poétique, le slam-théâtre (Langlois et Dospinescu, 2023). Je profiterai ainsi du colloque afin d’approfondir cette démarche en initiant Corpoème (titre de travail), un projet poétique qui s’intéressera le potentiel d’expression théâtrale, sculpturale et performative du corps en lieu in situ, ainsi que l’émission d’une poésie sonore en dialogue avec l’environnement.
Plus concrètement, j’installerai sur mon corps une ou plusieurs caisses de son qui diffuseront du texte poétique en continu, lequel abordera à divers degrés certains enjeux écologiques. Je composerai parallèlement une partition corporelle qui explorera différentes dynamiques de mouvements poétiques (ex. : postures statuaires). Mon objectif sera de dégager de ce travail une sorte de « corps-installation » tant sonore que visuelle, dont la superposition aléatoire du texte et des mouvements partitionnés offrira un potentiel de sens multiples. La seconde étape du projet impliquera pour moi d’explorer l’intégration et l’exécution performatives de ce « corps-installation » dans divers lieux in situ (ex. : un endroit passant) afin d’en explorer le potentiel de résonnances (conceptuelles, esthétiques et thématiques) avec ces espaces et environnements. Le bloc de l’Axe recherche-création du colloque me permettra de présenter, sous forme de conférence-démonstration, les premières esquisses, hypothèses et réflexions de ce projet neuf.
Bio: Artiste tant multidisciplinaire qu’indiscipliné, Thomas Langlois se définit comme poète-acteur-performeur et metteur en scène : en effet, il pratique et combine la poésie orale (slam), le théâtre (il se spécialise notamment dans la biomécanique de Meyerhold) et la performance, à travers des créations hybrides dont il assure souvent la mise en scène. Il est titulaire d’un Baccalauréat en théâtre (dramaturgie et mise en scène, 2013), puis d’une maîtrise en recherche-création (2016), sous la direction de Liviu Dospinescu et alors soutenu par une bourse du CRSH. Il y a développé la théâtralisation du slam jusqu’à créer son propre genre théâtral, sa signature artistique : le slam-théâtre. Il y poursuit actuellement des études doctorales sur le jeu cabotin, pour lesquelles il a été soutenu par une bourse de doctorat en recherche du FRQSC.
Claudia Bernal
Le corps-territoire comme lieu de résistance
En tant que femme-artiste-immigrante, j’ai pris conscience que les sujets de mes œuvres, les femmes mexicaines ou colombiennes, vivaient des expériences similaires aux miennes : des processus de déterritorialisation à cause de la guerre, de la pauvreté. Elles cherchaient des nouveaux territoires s’ouvrant sur un ailleurs, vers un avenir meilleur. En tant qu’espace, le corps a été associé à la carte géographique, à la prison, à la cage, au territoire. En Amérique latine, la conception du corps en tant que territoire a été élaborée principalement par les féministes et les autochtones. Ces mouvements abordent le concept de corps-territoire pour analyser leurs devenirs en tant que sujets d’action contre les pratiques patriarcales. Le corps est compris comme un lieu-territoire susceptible de devenir un lieu de résistance et d’expression des réalités sociales et politiques (Mc Dowell, 2000).
Pour le colloque Arts vivants, écologie, politique : fabriques d’un nouveau relationnel, je propose de retracer une partie du processus de création et un extrait de l’oeuvre Entre brouillard et cicatrices, résister / Entre niebla y cicatrices, resistir, une installation performative dans laquelle j’aborde le concept du corps-territoire. Ce processus m’a conduit vers les hautes montagnes colombiennes de Sumapaz et Rabanal, la région de Chorro de Oro (Guateque) et le village de Sutatausa. Habiter ces paysages, ces territoires autant géographiques qu’affectifs, m’a permis d’explorer mon propre corps-territoire ainsi que d’autres corps-territoires humains et non-humains avec lesquels je m’identifie comme femme-artiste-immigrante. Dans ces espaces, nous expérimentons différentes façons d’écouter, de marcher, de voir, de toucher, de sentir et de penser, qui m’ont motivé à créer cette œuvre comme un territoire de poésie et de résistance fait de textures, de sons, d’images et d’actions.
Bio: Artiste interdisciplinaire et chercheuse, Claudia Bernal est chargée de cours au Département des arts, des lettres et du langage de l’UQAC. Ses œuvres se situent à la croisée des arts visuels, du théâtre performatif et de la littérature. Elle détient un doctorat en études et pratiques des arts de l’Université du Québec à Montréal (UQAM). En 2023 Bernal a terminé un stage postdoctoral en recherche-création au sein du CELAT-UQAC. Ses recherches actuelles portent sur la relation corps-territoire / identité / résistance. Elle est détentrice d’une maîtrise en théâtre qui lui a permis d’approfondir ses recherches sur le texte en tant que matériau plastique et sur l’installation performative. Dans ses œuvres, les concepts de mouvement, de migration, d’espace et d’identité sont récurrents. Elle a présenté sa production artistique dans des musées, des centres d’artistes, des galeries et des espaces publiques.
Claudia Blouin
Faire monde avec la laine
Ma proposition est une performance d’une dizaine de minutes s’articule avec l’axe thématique Agir et être agi et s’inscrit dans le contexte de mon doctorat en recherche-création qui porte sur les devenirs du corps sur la scène dans leur rapport avec la laine prise comme matière plastique.
Sur scène, j’établis un dialogue avec des pièces de laine que j’ai tricotées et crochetées. Au contact de ces structures inanimées avec qui je partage la relation intime du geste artisanal, nous nous transformons les unes les autres. Ma corporéité (Bernard, 2001) traverse des états où la figure humaine se dissout pour ouvrir à un univers sensoriel de l’animalité, de l’insecte, de la chimère, du monstre. La laine et moi nous engageons dans un partenariat où nos devenirs (Deleuze et Guattari, 1980) s’offrent au public afin qu’il puisse vivre, par identification sensible aux sons, aux textures, aux formes et aux couleurs, l’expérience du corps autrement. Ce corps instable et poreux, ce corps hybride qui permet – j’en émet l’hypothèse à la suite des penseur.ses écologiques et néo-matérialistes – de vivre de nouveaux paradigmes relationnels avec son environnement, avec le non-humain et le non-vivant. Peut-être peut-il participer à « complexifier nos sensibilités et les relations que nous tissons avec nos milieux de vie » comme le propose Julie Sermon en clôture de Morts ou vifs (2021 : 146)? Faire monde (Deleuze et Guattari, 1980 : 344), devenir-avec (Haraway, 2016) en jouant à établir de nouvelles connexions entre soi et la matière pour cultiver l’étonnement dont nous avons tant besoin pour imaginer demain.
Bio : Claudia Blouin est doctorante en Littérature et arts de la scène et de l’écran à l’Université Laval (Québec, Canada). Artiste-chercheuse, elle s’intéresse à l’interartistique à travers le spectre du corps. Son projet doctoral est une recherche-création sur les devenirs du corps sur la scène contemporaine dans sa relation avec la laine. Ce projet reçoit le soutien du Fonds de recherche du Québec – Société et culture. Claudia poursuit sa réflexion sur ces sujets en contribuant à différentes revues et journaux académiques tels qu’aparté et Écosystème et en participant à des colloques à Québec, Montréal, Toronto et en Roumanie. En 2020, elle fonde La compagnie Doute autour du projet Ravel on the Beach, un spectacle de théâtre multidisciplinaire dont elle co-assume l’écriture et la mise en scène, présenté par JokerJoker à Québec en 2021.
Sylvie Lapierre
L’expérience immersive médiatrice de la résonance au sein du dialogue homme-nature
Cette proposition sera présentée sous forme performative à caractère immersif, incluant une vidéo, un dispositif sonore ainsi que des actions perfomatives sous l’axe AGIR et ÊTRE AGI.
Derrière les murs, suite à l’effondrement, se dévoile un paysage sans bord (Quéinnec) qui invite à vivre une expérience sensorielle et émotionnelle du monde. Le vivant se rencontre et croise le non-vivant sous des formes qui invitent à une écoute et une disponibilité. De là, la rencontre avec la vulnérabilité et la résonance qui émerge des différentes formes du monde. La technologie, de l’appareil photo au microscope électronique incite à voir autrement. La recherche-création à l’origine de ce déploiement a induit des actions qui ont favorisé le changement de paradigme entre l’acte de construire le monde et l’expérience sensorielle et émotionnelle du monde.
Les multiples niveaux de lecture et les temporalités variables qui vous seront proposées caractérisent l’atmosphère de ce théâtre immersif. « Il semble de fait que l’expérience du monde diffère fondamentalement selon la perception que nous avons de la source du mouvement: est-ce le monde qui vient à nous afin de nous défier et de nous mettre à l’épreuve? Ou bien est-ce nous qui pénétrons dans le monde, qui y cherchons des lieux à notre convenance, qui sommes attirés par ses sommets? » H.Rosa (2018)
La mise en scène du lien ontologique qui existe entre l’humain et son environnement et qui dispose à découvrir la plénitude inhérente à la mouvance du monde sera investie dans la juxtaposition de projections vidéos et sonores, d’actions performatives et d’installations. C’est dans la dimension sensible que provoquent les expériences extra-quotidiennes éveillées par l’atmosphère du lieu et sa résonance, que le corps transforme la potentialité en réalité tangible sous la forme d’un « mouvement issu de la vie interne » comme principe de renouvellement, vécu comme processus intime de changement du rapport à soi et au monde.
« Ce n’est pas seulement de souplesse intellectuelle qu’il s’agit ici, mais aussi de mouvance interne; pas seulement d’ouverture de pensée mais aussi de souplesse des attitudes, des gestes, des postures corporelles: c’est bien avec son corps aussi que l’on regarde son objet de recherche. Doté de cette malléabilité, on peut alors être à la fois distant et impliqué, immergé et surplombant. Expert et lucide. » Danis Bois (2007)
Chaque expérience vécue sur le terrain par et dans le corps a favorisé un niveau d’intégration et de compréhension qui transforme la posture verticale du départ en entrelacements organiques qui ont initié le dialogue entre art, corps, territoire et technologies. C’est un nouveau rapport à l’écologie qui émerge au coeur de cette pratique performative.
Bio : Étudiante au doctorat en « Littérature, arts de la scène et de l’écran », Sylvie Lapierre questionne, au cœur de la recherche-création, les possibilités de mettre en dialogue, non seulement les pratiques qu’elle maîtrise mais aussi celles qui présentent le défi de plonger dans l’univers des nouvelles technologies. Ces dernières ouvrent les possibilités d’appréhender l’espace, le temps et la forme en superposant plusieurs niveaux de compréhension et d’appropriation du sujet étudié. Ses pratiques actuelles; en tant qu’artiste et psychothérapeute soutiennent l’importance d’appréhender toute situation dans une perspective globale.
Son intérêt se porte sur la création d’espaces immersifs mettant en relief les notions de territoire et de société ainsi que la résonance avec les éléments du monde. Le dialogue qu’elle cherche à établir dans la mise en tension créée par l’interdisciplinarité, vise à interpeller le public en l’invitant à expérimenter les faits à partir de multiples niveaux de perception. En intégrant une présence performative, elle invite l’observateur à déployer une appréciation plus complète des enjeux soulevés par ses sujets de recherche.